Bien des meurtres se sont
déjà commis dans ce pays aux mille et une collines vertes qui sort de plus de
dix années de guerres civile. Mais jamais assassinat n’avait était si étonnant
par les victimes (des religieuses sexagénaires), surprenant, incompréhensible
par son déroulement, hors du commun, et surtout, choquant de part son caractère
ignoble et méchant.
C’est ce dimanche passée,
exactement le 7 Octobre 2014, que trois (d’abord deux puis trois) religieuses
de la paroisse Kamenge ont été sauvagement assassinées par décapitation. Je ne
veux pas relater ici le déroulement et tous les détails de cet acte ignoble.
Les journalistes dont la plume le fait mieux que moi s’en sont déjà occupés.
J’ai surtout été choqué
de voir le déferlement de beaucoup de polémique autour de cette mort, certain
frôlant même « l’incident diplomatique, d’après mon ami Roland Rugero du Journal « Iwacu». Un
énième preuve amère, témoignant de la vivacité des germes de la haine
ethnico-politique qui a minée nos sociétés des grands lacs africains, cela
depuis les indépendances.
Mais cet assassinat a
aussi réveillé en moi l’amoureux des romans et films policiers que je suis.
Beaucoup de détails dans ce triple homicide renvoient directement aux analyses
de plusieurs personnages de romans et de films policiers.
En réfléchissant sur les
faits tel que relatés dans les medias, je n’arrête pas de revoir dans ma tête
la série télévisée « Criminal Mind »
dont l’intrigue est centré sur les
affaires de meurtre résolues par le Département des Sciences du Comportement du
« Bureau Fédéral d’Investigation » américaine (F.B.I en anglais). Ce département
pratique ce qu’on appelle le « profiling ». Ca
consiste à résoudre un meurtre en commençant
par établir le profile psychologique et physique du meurtrier. Ce profile se dégage
de l’analyse des faits et de la scène du crime.
Amusons-nous alors à
essayer de faire un tel travail. Ne connaissant même pas encore le meurtrier,
on peut déjà poser l’hypothèse que pour tuer deux personnes, même d’âges avancés,
en les égorgeant et en veillant a ce que les victimes ne poussent aucun cris
audible a l’extérieur (en supposant que l’acte est commis a l’intérieur d’une
maison), il faut être fort physiquement ou a plusieurs, et surtout bien
maitriser une telle sale besogne.
Le meurtre s’est commis à
l’intérieur d’une maison. Ladite maison se trouve dans un enclos ayant une clôture
en brique cuites. Il y avait aussi des sentinelles. Le premier meurtre s’est
commis, d’après la police, entre 16h et 17h30. Peu importe la saison, à
Bujumbura, et à cette heure, la visibilité est encore grande, et permet la
distinction nette des objets et des personnes. Tous ces éléments mis ensemble,
on peut alors analyser l’entrée de l’assassin dans l’enclos et dans la maison.
Il aurait pu être vu. Mais cela n’a pas été le cas (1).
Une fois a l’intérieur de
la maison, l’assassin n’a pas eu a forcer les portes, d’après la police, vue
qu’aucun signe d’effraction n’a été constaté (2).
En combinant (1) et
(2) : Implication : soit l’assassin a été introduit par quelqu’un de
l’intérieur, soit il connaissait les lieux d’avance ; ou encore,
l’assassin serait une connaissance des victimes, par conséquent elles
n’auraient pas eu a s’inquiéter de sa présence, et lui aurait même ouvert la
porte et lui auraient proposé d’entrer, tout comme l’aurait fait les
sentinelles, bien avant elles, à la
porte d’entrée principale.
Poursuivons notre réflexion.
Cette fois ci, venons-en au crime lui même. Les victimes ont toutes été égorgées
(3). L’assassin a donc utilisé un même
mode opératoire. Malheureusement, on ne sait pas quel instrument il a utilisé. Il serait intéressant d’avoir l’arme du crime pour
analyse aussi.
Dans les premières heures
de la découverte des deux premiers cadavres, la police a affirmé que « visiblement » les victimes auraient été
violées. Dans un article publie par après
par le Journal Iwacu, sur base d’un rapport médical, il a été affirme qu’il n’y
a pas eu viol ou agression sexuelle sur les victimes (4).
Partant de (3) et
(4) : l’égorgement traduit une volonté bien manifeste de « vraiment éliminer »
une vie. C’est un acte qui prouve la détermination de l’assassin. Il élimine
ainsi toute possibilité de « gucika kw’icumu », d’échapper à la mort. S’il y avait eu viol, le triple homicide aurait
démontré un caractère psycho-pathologique de l’assassin du fait que la présence
d’un viol sexuel dans un meurtre, avant ou après commission de celui-ci,
traduit toujours ce caractère. Dès lors,
on peut se dire que l’assassin a git par conviction et détermination, et non
sous l’emprise d’une quelconque pathologie d’ordre psychologique.
Le troisième homicide est
aussi étonnant que les deux premiers. L’assassin serait-il revenu sur les lieux
du crime pour éliminer sa troisième, et ainsi supprimer un potentiel témoin ?
Ou serait-il resté cacher sur le lieu du
crime, attendant le bon moment pour la tuer ? Je ne saurai le dire. Mais
personnellement, j’éliminerais la deuxième hypothèse vue que la police affirme
avoir fouillé de fond en comble toute
la maison après découverte des deux premiers cadavres.
Et si le meurtrier serait
revenu sur le lieu de son premier forfait pour y commettre un deuxième, comment
a-t-il pu tromper la vigilance des policiers postés à l’entrée et des sentinelles présents l’intérieur
de l’enclos ? Me serais-je précipité en éliminant la deuxième hypothèse ?
J’ai beau me bruler les neurones, je ne vois pas d’autres scenarios possibles.
. . .
En surfant sur mon compte
Facebook ce matin, j’ai vu la photo du meurtrier. Je l’ai bien et longuement
regarde. Puis je suis allé à
Kamenge. Deux ou trois personnes que j’ai rencontrée disent connaître ce
« type ». Il le qualifie de fou. Ils disent même qu’il a un frère
jumeau, lui aussi encore plus fous. (Le meurtrier ayant comme nom de famille
« Butoyi », un « Bukuru » existe sans doute quelque part.
Donc il est for probable qu’il ait un frère jumeau). La folie ne se lisant pas
sur le visage, le meurtrier m’a semblé
simple, ordinaire, et sans histoire. Mais son triple homicide, quant à lui, semble bien plus complexe que ne l’est l’auteur. Il
me semble qu’une analyse plus minutieuse et professionnelle pourrait révéler
bien plus d’intelligence dans les faits de l’homicide que le meurtrier lui même
ne semble avoir. Ce qui accentuerait d’avantage le caractère « hors du
commun » du triple meurtre.